Il y a plusieurs années, j’ai été en contact avec une dame qui m’avait parlé de l’importance de s’émerveiller. Cela me semblait quelque peu étrange à l’époque… je ne pouvais m’empêcher de me remémorer un événement alors que je fréquentais pour la première fois un groupe de jeunes cathos.

Alors que je m’apprête à vous raconter cette histoire, je vous prie de ne pas penser que je suis en train de poser un jugement… OK… j’avoue, je pose un jugement… mais bon, il faut essayer de comprendre où je me situais à l’époque et d’où je venais.

Je m’approchais à peine de la foi… c’était au lendemain de mon bal des finissants que j’avais arrosé d’alcool et de substances autres dont je vous épargne les détails… disons juste que les substances étaient nombreuses et faisaient un party à eux seuls dans mon cerveau et dans mon corps.

J’étais à peine sevré et mon cerveau était encore rempli des chansons qui peuplaient mon lecteur CD de l’époque. Je vibrais au son de Tool, Stone Temple Pilots, Pearl Jam, Jimi Hendrix, Led Zeppelin, Blind Melon, etc. Et me voilà arriver à une réunion où on chantait : «Il est là, vraiment là, il est vraiment là le Seigneur notre Dieu…» sous les airs d’une mélodie sortie directement de passe-partout version jamais mûrie.

Étant arrivé en retard au son des guitares à deux accords agencés de peine et de misère, je frayais mon chemin au milieu de ces cathos aux sourires arborescents qui me remémoraient les chandails fluo jadis à la mode : en deux mots, pas mal trop pour les yeux et le cerveau. Et alors que j’allais m’asseoir, arrive ce frère aux dents bien assumées qui vient me donner une main molle avec un sourire aussi grand que nos nids de poule en me disant : «la paix de Jésus».

S’émerveiller de tout et de rien

Inutile de vous dire que mon désir de faire marche arrière était à son comble. Les chants, les guitares, les jupes démodées des filles et l’habillement similireligieux des garçons en plus des dents, des sourires et des paroles… j’en avais comme une overdose.

Bon, j’avoue que je ne sais pas trop pourquoi, mais l’émerveillement me ramenait à ce souvenir beaucoup trop «fake» de ce que devaient représenter les cathos : une famille heureuse. J’avais désormais des années de prêtrise à mon actif et je savais bel et bien que tout cela était plus de l’ordre du «faire croire» ou de l’«hypocrisie» que du quotidien de ces gens. De beaux sourires qui cachaient souvent des luttes intestines virulentes.

J’avais trop souvent l’impression que le «faire semblant» chez les cathos avait pris le dessus sur le réalisme de la vie et sur la réalité de nos santés mentales et de nos difficiles rapports en être humains. C’était comme du «lipsing» mal synchronisé sur une vieille chanson de Carmen Campagne… un désastre.

Ces images que je m’amuse à vous écrire auront peut-être le mérite de vous faire rire, mais j’ose espérer qu’elle sauront véhiculer ma conviction profonde : la nécessité d’être ancré en qui nous sommes et de devenir des êtres unifiés qui agissent et se comportent conformément à leurs beaux discours.

Et alors, s’émerveiller avait ce goût de trop dans ma tête et dans mon cœur… un semblant d’émission d’enfants et de naïveté humaine. «Il faut s’émerveiller de quoi ma chère?» je lui posai comme question… et aussi bêtement, elle me répondit : «De tout et de rien.»

S’émerveiller comme des enfants

Des années plus tard, je ressens la même forme de dégoût pour le fluo, les dents et les faux sourires, mais je comprends un peu plus le sens de ce besoin de s’émerveiller au quotidien… une réalité que nous avons malheureusement trop souvent perdue.

Comment être surpris en 2023 alors que nous vivons aisément dans nos conforts et commodités? C’est un peu comme chercher le cadeau à donner à quelqu’un qui a déjà tout et plus que le nécessaire. Qu’est-ce qui pourrait le/la surprendre?

Alors que la technologie ne cesse d’évoluer, avons-nous encore le même sens de l’émerveillement que lors de la sortie de Windows 95? Ou sommes-nous saturés de nouveautés au point où plus rien ne nous surprend? Avons-nous cessé de nous émerveiller?

Et pourtant la vie ne nous place-t-elle pas devant des surprises? Des défis? Des cadeaux? Se laisser éprendre comme un enfant et laisser nos cœurs se remplir de reconnaissance ne serait-ce pas une forme primitive de bonheur facilement accessible?

S’émerveiller pour goûter le bonheur?

Et alors que tout avoir ne semble pas la réponse ou la source du bonheur, de nombreux êtres humains retournent vers une plus grande simplicité de vie. Combien de personnes cherchent désormais à l’inverse du «tout avoir» et du «paraître» pour remplir un vide intérieur difficile à combler!

Pour ma part, je ne peux pas dire que je suis sans désirs et sans rêves… mais je tente depuis longtemps de m’émerveiller et d’être reconnaissant. Je suis loin de profiter de tout et de me laisser imprégner par le moment présent, mais je me surprends à apprécier les étoiles dans le ciel de Mirabel, les bouffées d’air frais alors que je marche dehors, la neige décorante qui me fait penser aux globes «à secouer» de nos enfances et le goût de mon café alors que mon âme s’éveille à la journée.

Goûter les petits bonheurs du quotidien, ceux gratuits, ceux sans prétention, ceux sans décorum, n’est-ce pas une façon de s’émerveiller? J’aimerais parfois retrouver mon cœur d’enfant qui se couchait dans la neige tout en léchant le mucus sortant de son nez afin d’observer le ciel et ses nuages finissant par oublier le temps. Bon, disons que le mucus me manque moins que l’innocence du moment, mais vous comprenez l’idée j’espère.

Et alors que je meuble mes quotidiens de spontanéité et de fous rires, que j’apprends à aimer mes larmes et mes moments de mélancolie, je m’émerveille de cette vie qui se déploie devant moi… de celle qui se déploie devant les autres… de celle qui fraie son chemin, hors de notre contrôle et de nos attentes afin de meubler notre quotidien de tendres moments.

Je n’ai pas de formule magique… je ne voudrais pas vous faire croire que tout est facile… mais je sais que la vie gâte ceux et celles qui savent reconnaître et remercier… elle facilite ceux et celles qui continue de croire que tout ce que le cœur désire, l’univers attire.

Mais comment attirer ce qui n’est pas présent ou pas clair dans nos cœurs et dans nos têtes? Et comment reconnaître ce que nous désirons vraiment si nous n’avons jamais pris le temps de nous reconnecter à l’essentiel?

Voilà… je m’émerveille de toi qui me lis, de toi qui s’inscrit à mon blogue… de toi qui partages et commentes… parce que je sais que comme moi, tu cherches ce qui demeure.